samedi 22 avril 2023

La pendue de Gahard

    Voilà sept ans maintenant, le 3 mars 2015, dans une communication "Quelques exemples de pendaisons effectuées en Bretagne en 1944", j'évoquais le sort tragique de deux femmes pendues en Ille-et-Vilaine au mois de juillet 1944, quelques jours avant la Libération. Cet article fut consulté à 3627 reprises. Peu de temps après, le 27 juillet 2015, j'évoquais à nouveau le cas, qui eut un fort retentissement dans la presse, des trois femmes pendues à Monterfil le 4 août 1944, quelques jours après la Libération. Cet article fut consulté 3675 fois.

    Une fidèle lectrice de ce blog m'a fait part récemment du "martyre d'une femme allemande mariée à une personne du coin", et dont elle a gardé le pénible souvenir. L'affaire se passe à Gahard, une charmante localité située au nord de Rennes, sur la route nationale d'Antrain, qu'empruntèrent les GI de la 4e DB du général Wood, descendant d'Avranches vers Rennes, le 1er août 1944 :

    "On a contraint la population, enfants compris et sous la menace d'armes à défiler devant elle, ligotée sur une chaise dans le café du village, on nous a contraints à cracher sur elle. Ensuite, ses bourreaux l'ont fait monter dans un camion en hurlant et ils sont allés pendre cette femme, uniquement parce qu'elle était allemande. Les gens autour étaient révoltés et tous disaient être indignés, Mon Grand-Père avait fabriqué un poste à galènes pour écouter en cachette (c'était dangereux !) la voix de la Résistance... L'indignation était générale et pour ceux qui ont fait couvrir cette femme de crachats, au seul motif qu'elle était allemande, j'éprouve comme les gens de Gahard ou les réfugiés - dont nous étions -, le plus profond mépris. Ma petite sœur avait 2 ans1/2 au moment de ce crime, ses souvenirs de cette atrocité correspondaient aux miens et mon étonnement est grand vu son jeune âge... Cette injustice-là ne passe pas, ma sœur nous a quittés aujourd'hui.
    Ce qui m'étonne, c'est le silence sur ce crime... Cela s'est passé à Gahard, après la libération et les Américains qui sont venus dans le village: ils nous prenaient dans leurs bras dans leurs jeeps et nous donnaient des chewing-gum que nous prenions pour de petits savons, ces moments heureux sont gravés mais le crime, l'inhumanité sont gravés plus profond encore, d'autant plus que nulle trace n'en subsiste, c'était après la Libération de Gahard en 1944..."

    S'il n'est pas possible d'établir formellement un lien entre elles, il est difficile de ne pas faire un rapprochement avec les deux autres affaires évoquées plus haut, au mois de juillet, et qui concernent aussi deux "Alsaciennes", de langue allemande probablement. En effet, à quelques kilomètres à l'ouest de Gahard, sur la commune de  Saint-Médard-sur-Ille, une cinquantaine de jeunes FTP tiennent un petit maquis où la discipline y est très sévère. Le chef du maquis ayant menacé de la peine de mort tous ceux qui ne la respecte pas. Parmi ces maquisards, l'un d'eux est marié avec une alsacienne qui lui reproche de façon un peu trop véhémente de combattre l'armée allemande dans laquelle servent plusieurs de ses frères incorporés de force. Le maquis attaqué, elle est accusée de les avoir dénoncés aux Allemands et condamnée à mort par le chef du groupe avec, semble-t-il, l'accord du mari. Saisie par deux maquisards le 13 juillet, elle est emmenée sur le lieu de l'exécution où elle doit être pendue. Les choses ne se passent pas comme prévu. La condamnée, découvrant ce qui l'attend, ne se laisse pas faire. Ses hurlements risquant d'attirer l'attention des Allemands cantonnés à proximité, deux maquisards l'étranglent en présence de son mari. 

    Ce maquis n'étant plus sûr, décision est prise de le transférer en forêt de Haute-Sève, justement située entre la commune de Gahard et Saint-Aubin-du-Cormier (proche du Camp de la Lande d'Ouée, du 11e RAMA). Si les hommes cantonnent en forêt, les femmes logent dans une ferme voisine. Là encore, le chef constate que le maquis est très surveillé, par les Allemands mais aussi par la Milice, arrivée à Rennes et très active dans la région. Deux hommes et une femme sont à nouveau suspectés d'avoir dénoncé le groupe aux Allemands. Ils sont connus pour ravitailler au marché noir les policiers du SD de Rennes. Deux maquisards qui partaient en mission ayant été attaqués par les Allemands à proximité du camp, il ne fait plus aucun doute pour le chef du groupe qu'ils ont été dénoncés par ces deux hommes et cette femme, qui sont ensuite capturés puis condamnés à mort. Le 31 juillet, on retrouvera les corps des deux hommes et de la femme se balançant aux branches des arbres de la forêt. 

    En 1945, lors du procès au tribunal militaire, le commissaire du gouvernement, dans un réquisitoire très dur à l’égard des accusés, réclame la peine de mort contre le chef du maquis, lieutenant FFI, qui couvre ses hommes, expliquant qu’ils n’ont fait qu’exécuter ses ordres, et les travaux forcés contre les cinq autres. Plusieurs témoins louent la bravoure et le patriotisme de ces jeunes résistants. Après le témoignage d’un colonel de gendarmerie, lui-même résistant, le groupe est finalement acquitté. Quelques années plus tard, une contre-enquête sera effectuée. Elle met en évidence que l’accusation de dénonciation prononcée contre l’Alsacienne ne reposait sur rien de solide. Selon ses voisins, elle était incapable de dénoncer des patriotes. Et si les trois autres trafiquants n’étaient guère fréquentables, rien ne permettait de dire qu’ils étaient des indicateurs.

 

vendredi 27 janvier 2023

Gwenn ha Du, du blanc au noir : les engagements de Morvan Marchal

Rarement un parcours politique aura été aussi sinueux et déconcertant que celui de Morvan Marchal, né à Vitré en 1900, à qui l'on doit la renaissance du mouvement breton d’après-guerre, le second Emsav, dont la meilleure traduction serait en italien Risorgimento. (1) Tout commence en 1918, avec un bref passage à l’Action Française. En septembre de la même année, tout juste bachelier aspirant à des études d’architecture à Rennes et désireux de rompre avec le régionalisme conservateur de l’Union Régionaliste Bretonne du marquis régis de l’Estourbeillon, Marchal et quelques jeunes gens de son âge fondent le Groupement Régionaliste Breton (GRB), « de tendance Maurrassique et provincialiste », dont il devient le secrétaire général. Quelques mois plus tard, deux autres jeunes gens, appelés à une certaine renommée, Debauvais et Mordrel, rejoignent le groupe. « En cette fin d'année 1918, l'homme du destin fut Maurice Marchal, étudiant en architecture à l’École des Beaux-Arts de Rennes. Au milieu de ses jeunes camarades, dont la culture bretonne se résumait souvent au souvenir de quelques chansons de Botrel, il était celui qui savait. Il possédait à fond son histoire de Bretagne et avait quelques lumières sur les réveilleurs de la nationalité assoupie. Nous accourions à lui comme à un oracle.» (Breiz Atao, p. 42, Olier Mordrel). Au mois de janvier 1919, parait le premier numéro de Breiz Atao, journal du GRB, codirigé par Mordrel et Marchal, ce dernier se faisant déjà remarquer par ses articles :

« La création d’une langue littéraire unique et le perfectionnement de la langue, œuvre de bretons admirables, sont une tache indispensable et sacrée. Mais pas d’illusions, ce travail formidable ne  trouvera sa pleine expansion que chez un peuple enflammé par un ardent sentiment national. Seul un peuple qui aimera sa patrie, son passé, sa nationalité, aimera sa langue, seul il veillera à la sauvegarder de tout abâtardissement et a l’assouplir aux exigences modernes (…) C’est cela et uniquement cela le vrai « nationalisme breton. » (B.A. N°8, 1920)

L'adresse du journal, 4, place de Bretagne, est celle du domicile de ses parents. Sa mère est née à Piré (35), son père, Victor Marchal, originaire de Gerardmer dans les Vosges, est contrôleur des PTT.

En 1921, leurs relations étant de plus en plus tendues, Marchal démissionne du GRB pour divergence de vues avec Mordrel, sur lequel il avait pourtant exercé une certaine ascendance. Mais le ver était dans le fruit. S’il n’est pas le plus assidu à l’école régionale d’architecture, dont il est pourtant perçu comme l’un des élèves les plus brillants de sa promotion, son intempérance est déjà légendaire. C’est durant cette période qu’il conçoit le fameux Gwenn ha Du et adhère en 1924 à l’Union de la jeunesse de Bretagne, Unvaniez Yaouankiz Vreiz (UYV), tout en continuant d’écrire dans Breiz Atao. En septembre 1925, Breiz Atao lance une souscription pour un drapeau de l’UYV « étendard symbolisant notre patrie et nos idées ». Le journal précise : « N’est-ce pas un paradoxe que le groupement qui, le premier s’est réclamé de la nation bretonne, ne possède pas orgueilleusement le drapeau de ses idées et de ses espoirs : le drapeau national ? » Un  an plus tard, le journal informe ses lecteurs que « Jos Le Gars de Rosporden, prépare un fanion breton pour les propriétaires de moto, vélo, auto, sur le modèle du futur drapeau de l’UYV. » 
Si elle affiche son nationalisme breton et adopte le Gwenn ha Du comme emblème du parti, l’UYV incline nettement à gauche avec l’arrivée de nouvelles recrues comme Maurice Duhamel, Goulven Mazéas, René-Yves Creston ou Youenn Drezen. Cet afflux de nouveaux adhérents séduits par le fédéralisme incite ses fondateurs à transformer l’UYV en Parti autonomiste breton (PAB) lors du congrès de Rosporden en 1927 et dont Marchal s’impose comme le théoricien. Rejetant le séparatisme, le PAB est partisan d’une autonomie administrative et politique de la Bretagne dans le cadre d’une France fédérale. Cependant, la crise ne tarde pas à éclater entre les nationalistes et les fédéralistes, qui voit de nouveau Marchal démissionner en juillet 1928 pour divergences de vues avec son alter-ego Mordrel. Cette même année, alors qu’il vient d’obtenir son diplôme d’architecture, Marchal est recruté par Creston, qui apprécie sa solide culture et surtout sa belle plume, pour rejoindre le groupe des Seiz Breur. Marchal avait déjà expliqué dans Breiz Atao le retard artistique de la Bretagne par l’inexistence d’un pouvoir politique « Là où il n’y a plus de Bretagne, il ne saurait y avoir d’art breton. Essayer de réveiller l’art breton pour lui-même, c’est mettre la charrue avant les bœufs. Il faut des organismes de vie, des institutions bretonnes, un nationalisme breton » (B.A. n° 7, 1924)
 

Après la scission de 1931, le PAB n’existe plus. La tendance séparatiste, emmenée par Mordrel et Debauvais, fonde le Parti national breton (PNB), qui ne s’encombre pas de considérations démocratiques et met la main sur Breiz Atao. En réaction, les fédéralistes de gauche, emmenés par Marchal, se regroupent dans la Ligue fédéraliste de Bretagne qui reprend peu ou prou les principes du PAB. La double appartenance est acceptée. C’est ainsi que Marchal adhère au Parti radical-socialiste. La Ligue publie une revue, La Bretagne Fédérale, dont le contenu se démarque totalement de Breiz Atao :

« Le langage des feuilles nationalistes bretonnes n’est pas différent de  celui des journaux chauvins du monde entier (…) La pensée des racistes bretons semble singulièrement dangereuse pour la figure du futur état breton. Un pays aussi varié que le notre ne saurait s’accommoder d’un État fondé sur un principe unitaire, ni au nom de la race aryenne, ni au nom d’une confession déterminée, ni au nom d’un celtisme imposé et de commande (la Bretagne n’est, anthropologiquement parlant, que fort peu nordique). Il n’y a jamais eu, il n’y a pas, il ne peut y avoir en Bretagne de mise à l’index contre l’un quelconque de ses enfants. Derrière le drapeau, même breton, largement déployé, il y a presque toujours un coffre-fort. »

Les intentions sont louables, mais les effectifs squelettiques, une demi-douzaine de membres en 1933. Le journal ne parait plus que sur une feuille et entre peu à peu en sommeil. En ces années troubles, où tout semble réussir au fascisme, la dynamique est du côté du PNB et son culte du chef.

La rupture avec l’Emsav

En 1935, Marchal, toujours hanté par ses vieux démons au point d’être révoqué de son emploi de professeur à l’école régionale d’architecture, quitte Rennes pour Laval. Toujours membre du Parti radical-socialiste, il rédige des articles pour Les Nouvelles Mayennaises et pour La Mayenne Laïque. Il est également membre de la section lavalloise de la Ligue des droits de l’Homme. Avec de telles dispositions, c’est tout naturellement qu’il sollicite une entrée en franc-maçonnerie à la loge « Volney », dont Marius Lepage, fonctionnaire à la préfecture, est le vénérable maître :

« Je connaissais Marchal. Sa réputation était très attaquée et attaquable car il buvait tellement qu’on pouvait le taxer d’alcoolisme (…) Marchal faisait preuve d’une intelligence remarquable en ce qui se rapportait à l’architecture et au druidisme. En 1937 il sollicita son admission à la loge de Laval (Volney). Cette admission était très discutée et plusieurs enquêtes furent faites sur son compte, tant à Laval qu’à Rennes (…) Il fut reçu en loge en avril 1938. Il nous donna toute satisfaction par la nature et la valeur de ses travaux littéraires, dont le dernier et le plus important sur « La notion des nombres en architecture opérative », publié dans la revue maçonnique internationale « Le Symbolisme ».

Alors que son Gwenn ha Du flotte au sommet du mât du pavillon de la Bretagne à l’exposition universelle de 1937, gagnant ainsi un statut quasi-officiel, Marchal prend ses distances avec le mouvement breton, hormis sa signature au bas d’une déclaration des Fédéralistes en 1938 « Dénonçant le fascisme en Europe et les idées fascistes en Bretagne dont Mordrel se faisait le représentant ainsi que Debauvais. » En 1939, dans le journal Le Fédéraliste, Marchal conclut un article en ces termes « A la veille d'une rupture désespérée, que je sens imminente, entre toute une partie,  dévouée à la Bretagne jusqu'au suprême sacrifice, de la jeunesse bretonne, et l’État français, je ne puis, républicain et laïc sans reproche, loyal citoyen de l’État français que je crois perfectible, Breton jusqu'aux moelles, taire ma pensée. Il est urgent pour Paris d'envisager, avec des yeux dénués de passion, le problème breton. » Au mois de janvier de la même année, face au sectarisme anti-gallo des extrémistes du PNB et soucieux de réveiller la conscience bretonne en Haute-Bretagne, il est sollicité par le vitréen Jean Choleau qui vient de fonder l’association des Compagnons de Merlin.

Les années noires

Alors qu’il avait cessé toute activité politique, en mars 1941, après sa démobilisation, Marchal adhère au parti collaborationniste le Rassemblement National Populaire (RNP) de l’ancien socialiste Marcel Déat, qu’il quitte en juillet 1943. Ce qui lui sera reproché à la Libération et figure sur l’acte d’accusation de son procès. Après la déposition de Marius Lepage, il sera finalement disculpé de cette accusation :

« La situation était devenue difficile pour tous les francs-maçons de Mayenne, tant par les poursuites de Vichy que par l’action du sieur Leloup, un agent des plus actifs de la police allemande. C’est alors qu’en qualité de plus haut dignitaire de la maçonnerie en Mayenne, je résolus de parer dans la mesure du possible les coups qui pouvaient bientôt être portés à plusieurs membres de la loge de Laval. En conséquence, Marchal étant maçon depuis peu de temps, n’étant par conséquent guère connu comme tel, je lui fis savoir que je verrais d’un bon œil son entrée dans le RNP afin de surveiller Leloup et de me tenir informé de son attitude et de ses intentions, l’individu étant bavard et hâbleur. C’est dans ces conditions que Marchal entra au RNP où il nous fut très utile. A l’époque j’avais fait connaître cette méthode à mon préfet, ainsi que plus tard à son successeur et nous en retirâmes profit en plusieurs occasions. »

Réunion de l'Institut Celtique devant le restaurant La Chope


Bien qu’il ait rompu avec le mouvement breton, qui se résume alors au PNB, Marchal, converti au néo-paganisme, n’en continue pas moins de retrouver régulièrement ses amis des Seiz Breur à Rennes. Du 20 au 25 octobre 1941, il participe à la Semaine celtique, sorte d’états généraux de la culture bretonne, qui verra Creston annoncer la création de l’Institut Celtique de Bretagne. Un premier congrès se tiendra à Nantes au mois de mai 1942, suivi par un second à Rennes au mois de juin. Toutes ces activités font l’objet d’une surveillance discrète des Renseignements Généraux « 10 juillet 1941, arrivée à Rennes du nommé Creston René, autonomiste breton. 4 novembre 1941, demande de renseignements : Hemar, Tullou, Marchal, Choleau, Danio. 12 novembre 1941, au sujet de Marchal désigné pour exercer une fonction aux Compagnons de Merlin. » (2)

En 1942, c’est un Marchal en totale rupture avec ses idées d’avant-guerre qui publie Nemeton, une revue « d’études druidiques », dont l’ennemi est la civilisation judéo-chrétienne, avec des articles antisémites que ne renieraient pas un Céline ou un Mordrel :

« Devant nous, l’Europe, pensée millénaire se refait. Elle se refait cette fois, non plus aux abords de la vieille Méditerranée, mais autour des peuples du Nord. Le monde neuf devra donc beaucoup, par le peuple qui le construit et par son chef, à l’esprit nordique. Deux millénaires de judaïsation se terminent. » (N°1, 1942)

« La forêt qui entoure la clairière druidique se dresse partout en terre du Nord-Ouest, sur le sol des Celtes ; les dattiers et les grenadiers de Judée ou d’Arabie n’y peuvent que dépérir. Aussi nous serons-nous absolument étrangers aux métaphysiques sémites, desquelles nous n’excluons nullement le christianisme. » (N°2)

« Or, maintenant que, sous les coups de la force nordique, s’écroule le temple du dernier dieu juif, de l’or, avec tout ce qu’il contenait de cosmopolitisme grégaire, pour ses esclaves aryens, il nous apparaît, plus qu’à tout autre moment de l’histoire, que nous, Celtes de l’Occident européen, avons été frustrés au cours des âges, d’un héritage magnifique. » (N°2)

« Tous les États autoritaires d’Europe ont dû adopter une législation d’exception concernant les Juifs. En Allemagne, cette législation est fondée, d’une part, sur les principes ethno-eugéniques formant la base de la communauté germanique, d’autre part, sur le rôle économique purement parasitaire que joue l’israélite au sein de la société. » (N°5)

« Nous attendons de Vichy une loi complémentaire précisant que, parmi les                              nombreux agitateurs juifs crucifiés voilà 20 siècles, Jésus fils de Marie était                         également fils du Maître de l’Univers, et que   les Israélites sont punis pour cela et                 rien que cela. »

Sans emploi, Marchal reconnaît avoir perçu des appointements de la part de l’occupant du mois de novembre 1942 au mois de février 1943, alors qu’il était employé comme dessinateur dans un  bureau du génie allemand. Arrêté à la Libération, il est interné au camp Margueritte le 28 septembre 1944. Traduit devant la Chambre civique de Rennes, on lui reproche ses relations avec les membres du PNB, mais l’accusation principale repose sur les déclarations d’un certain Claude Geslin, l’accusant « d’avoir été une vingtaine de fois » au Sicherheitsdienst (SD), le service de sureté de la SS, souvent confondu avec la Gestapo. Accusation d’autant plus grave que son nom figure sur une liste d’agents du SD sous le N° SR 700. Il y est présenté comme « économiste » et inscrit au RNP. Ce qui ne manque pas d’étonner Marius Lepage : « J’ignore absolument tout des rapports que Marchal a pu avoir avec des membres de la Gestapo (…) qui ne faisaient pas partie du plan d’action très précis et très délimité que je lui avais tracé dans le cadre du RNP. Dans le cas ou ces relations auraient existées il conviendrait de bien préciser si Marchal a été un élément actif ou un        imbécile. En effet, jusqu’à preuve du contraire je le tiens pour un homme de caractère        faible mais sincère. Physiquement très diminué son sens moral est affaibli mais nous    avions je crois sous l’influence de la discipline maçonnique réussi à le relever et à lui redonner quelque dignité. Je serais extrêmement surpris et douloureusement peiné qu’à la fois il nous eut trahi et commis une infamie. » (3)

Adjudant Hans Grimm
Cette accusation de Claude Geslin, personnage peu recommandable qui fait fonction d’interprète au SD dont il est l’un des agents les plus redoutable, N° SR 923, mais également membre de la Milice après avoir été exclu du PNB, est vivement contestée par Marchal : « Je reconnais mes torts d’avoir été demander des services aux allemands à Rennes car j’ignorais que la maison des étudiantes était le siège de la Gestapo. C’est surement sur ma carte d’identité qui a été deux fois entre leurs mains que mon identité et mon adresse ont été relevées. » Cette fameuse liste d’agents de la Gestapo, dressée par les Américains à partir de fiches individuelles, comportant un N° suivi des lettres SR (pour Sicherheistpolizei), saisies à la Libération au siège du SD, est à manipuler avec beaucoup de précaution. Aux côtés d’authentiques indicateurs ou agents du SD, comme par exemple : Maurice Zeller SR 205, Guy Vissault SR 913, Émile Schwaller SR 921, sont inscrites des personnes dont on se demande bien quels renseignements elles pouvaient fournir sur la Résistance. Ce que confirmera le prisonnier Adolf Breuer, adjudant du SD, lors de son interrogatoire : « Je dois préciser qu'il peut arriver qu'un n° SR ait été attribué à un homme qui n'a pas travaillé pour nos services comme indicateur. Ainsi, pour pouvoir rencontrer nos fournisseurs habituels, au marché noir, nous renseignions à nos chef sous un N° SR, bien qu’ils ne fussent pas agents indicateurs. » (Breuer évoque aussi des maîtresses d'officiers du SD). Agent des Allemands, Marchal aurait du logiquement comparaitre devant la Cour de justice, et non devant la Chambre civique, qui ne juge que des faits mineurs de collaboration avec des peines d'indignité nationale. Il déclare s’être rendu au siège du SD par l’intermédiaire de Mordrel début 1942 pour obtenir l’autorisation de paraître pour sa revue Nemeton. Il y retourne une deuxième fois en compagnie de Mordrel pour empêcher la réquisition de l’appartement de sa mère, place de Bretagne, puis une troisième fois pour échanger un exemplaire de Nemeton contre un ouvrage de Hans Grimm, un officier du SD, qu’il lui rendra au mois de mai 1944. Il déclare également n’avoir vu que deux fois Geslin, dont une lorsqu’il arrive en gare de Rennes pour assister au congrès celtique et rencontre Mordrel en compagnie de Louis-Ferdinand Céline. Geslin emmène Mordrel et Marchal en voiture et se vante auprès de Mordrel d’avoir abattu la veille un individu armé rue Dupont-des-Loges

Arrêté puis transféré au camp de détention administrative de Margueritte le 28 septembre, Marchal est condamné à quinze ans d’indignité nationale. Peine qui sera amnistiée en 1951. Il est libéré le 2 mars 1945, avec une mesure d’éloignement de la Bretagne.

1 - Le terme est attesté dans le journal Peuples et Frontières, N° 11, 1938 « en général toutes les publications ayant joué un rôle dans notre Risorgimento »

2 – Registre des courriers et notes des Renseignements Généraux.

3 – Déposition de Marius Lepage, PV du 10 octobre 1944. J’ai volontairement retiré les passages concernant la vie privée de Marchal.

Entendu lundi 12 février sur France Culture, dans l'émission Enjeux territoriaux "Décentralisation ou décomposition nationale ?", le  très médiatique Benjamin Morel déclarer le plus sérieusement du monde que le créateur du Gwenn ha Du avait été un "collabo" membre de l'hebdomadaire "Je suis partout" ! (On ne prête qu'aux riches) Notre brillant politologue a probablement confondu avec Morvan Lebesque...