Si les crimes commis par certains
résistants lors de l’épuration « extrajudiciaire » ont fait l’objet
de nombreuses études ou publications, l’implication des parachutistes français
du SAS dans ces exécutions sommaires reste aujourd’hui encore assez méconnue,
sinon un sujet tabou. Créé en 1941 par les Britanniques, le Spécial Air Service n’est pas une unité
militaire comme les autres. Ses méthodes d’action de type commandos diffèrent
profondément de celles, plus conventionnelles, engagées sur le front de
Normandie. Largués loin derrière les lignes ennemies, en marge du théâtre principal
de la bataille, les parachutistes français du 4e bataillon SAS
avaient pour objectif de procéder à des opérations de sabotages sur les voies
de communication, retardant ainsi l’envoi de renforts ennemis vers le front, mais
aussi d’armer et d’encadrer les maquisards pour leurs opérations de guérilla. En
cas de capture, dans les jours qui suivent leur parachutage du 6 juin en
Bretagne, on constate que ces soldats revêtus de leur uniforme sont
généralement traités comme des prisonniers de guerre, puis envoyés dans un
stalag. Après la chute du camp de Saint-Marcel, les Allemands se livrent à une
traque sans merci aux parachutistes désormais considérés, au même titre que les
maquisards, comme des « terroristes » (1). A partir du 7 juillet, et l’ordre
d’Hitler de « supprimer les terroristes », la répression allemande va
atteindre son paroxysme avec des massacres d’une cruauté inouïe. Les officiers
SAS capturés sont remis par la Wehrmacht aux policiers du SD et leurs agents, dont la bande à Maurice Zeller, qui vont tenter de
leur arracher des informations sous la torture dans les geôles de Pontivy, pour
ensuite les exécuter. Ces violences extrêmes – probablement uniques dans
l’histoire des FFL – subies par les parachutistes, n’excusent en rien leur
participation aux exécutions sommaires commises en réaction contre des « collabos »
ou des « traîtres » dans ce que l’on a appelé la « justice du
maquis », mais elles ne sont certainement pas pour rien dans ces
« dérapages de guerre » du SAS.
Cela
commence le 8 juin 1944, deux jours après l’installation de la base Samwest
dans la forêt de Duault, lorsqu’un certain Ernest Jean, architecte de la région
parisienne réfugié dans la région, est arrêté par des maquisards qui ont trouvé
sur lui des plans de la forêt alors qu’il s’approche de la base. Se présentant
comme un émissaire de Branchoux, chef de l’AS de Guingamp, Jean est suspecté
d’être un espion et de se livrer au marché noir. Le capitaine SAS Leblond le
fait interroger par les lieutenants François Martin et Georges Willard. Malgré
le fait qu’il soit défendu par les partisans de Branchoux, Leblond se range
derrière l’avis des FTP qui considèrent le suspect comme coupable. Le 11 juin
au soir, veille de l’attaque de la base par les Allemands, Ernest Jean doit
creuser sa propre tombe avant d’être poignardé par les parachutistes (2). On dénombre 5 parachutistes et 2 FTP tués lors des combats de Duault. D'après l'interrogatoire du capitaine Wilhelm Albrecht, qui commandait le bataillon, les Allemands ont perdu 14 hommes (3).
Le
18 juin, après la chute du "maquis" de Saint-Marcel - qui n'a jamais été un maquis au sens exact du terme mais un camp de regroupement et d'armement des FFI - et la dispersion des
parachutistes, le colonel Bourgoin, qui avait troqué son uniforme pour des
vêtements civils – ce qui mettra hors de lui le général Mac-Leod à Londres –
s’est réfugié au village de la Foliette, en Sérent, avec l’état-major FFI, où
il restera jusqu’au 28 juin. Une
jeune femme, Désirée Le Mené, dont le mari est prisonnier de guerre, avait
quitté Vannes pour venir se réfugier dans ce village avec son fils, âgé de
douze ans. Un groupe de FFI occupant les bâtiments d’un vieux moulin
appartenant à son frère, elle s’y rend pour exiger leur départ. Afin d’éviter
des complications, le colonel Morice
lui propose 5 000 F pour la location. Surnommée « la poule à
boches », sa présence est perçue comme une menace pour les résistants.
D’après le journal de la Résistance Le
Maquis Breton : « Quelques
jours après, un lieutenant parachutiste et quelques-uns de ses hommes
aperçurent un convoi allemand conduit par des voitures de la Gestapo, se
diriger vers le village de Plumelec. Une des voitures s’arrêta pour y faire
monter la femme suspecte. Cette expédition punitive se termina par l’arrestation
de 17 patriotes dont les corps mutilés furent retrouvés, un an après, dans le sinistre charnier de
Penthièvre (…) Le lieutenant parachutiste estima qu’il y a avait urgence à
mettre cette femme hors d’état de nuire, et il donna l’ordre à trois de ses
hommes de l’arrêter dès qu’elle regagnerait son domicile. L’arrestation fut
opérée, mais il fut impossible de séparer la mère du fils qui tous deux furent
conduits dans une ferme des environs de Sérent. » Le 10 juillet, elle
est enlevée avec son fils par trois jeunes FFI, pour être dirigée sur Sérent.
Le groupe s’arrête d’abord dans une ferme de Brancelun pour se faire servir à
boire, puis se rend à Tréviet, où Désirée est violée par les trois hommes.
Puis, toujours avec son fils, elle est emmenée dans une ferme occupée par un
groupe de FFI, au lieu-dit Bohurel, en Sérent, pour y être interrogée. D’après Le Maquis Breton : « La femme avoua avoir donné les noms de sept
résistants arrêtés lors de la rafle de Plumelec. Elle avoua également des
relations intimes avec les Allemands. Les instructions furent d’exécuter la femme sans toucher à l’enfant. La
ferme menaçant d’être encerclée par les Allemands, ordre fut donné d’exécuter
la femme et l’enfant, qui seront enterrés à proximité. » Un des
trois ravisseurs étrangle donc la malheureuse puis son fils, dont il fracasse
la tête contre un arbre. Il faudra attendre le retour de captivité de l’époux
de Désirée pour découvrir cette tragédie et des accusations qui ne reposaient
sur aucun fondement. Ce drame aura un certain retentissement dans la presse
régionale. Les associations d’anciens résistants se mobilisent pour soutenir
les trois meurtriers. Dans Le Maquis
Breton, Paul Chenailler, alias « colonel Morice », s’étonne que
l’on n’ait pas auditionné les SAS dans cette sordide affaire, alors qu’ils
avaient quitté les lieux à cette date : « A-t-on
entendu les officiers et soldats rescapés du 2e Régiment de
Chasseurs parachutistes qui ont été les témoins de l’activité de cette agente
de l’ennemi ? Evidemment pas, ni le colonel Bourgoin, qui faillit être sa
victime, ni le Capitaine Leblond qui l’entendit, ni les autres. Sans qu’on les
entende, ils ont estimé devoir m’adresser le télégramme suivant :
« Pouvez croire à notre sympathie et compter sur notre appui total pour
affaire FFI Morbihan – Le Comité de l’Amicale des anciens parachutistes SAS. »
A l’issue du procès, les trois accusés, dont l’un est le fils d’un haut
responsable de la Résistance, seront acquittés.
Fernand Bonis, photo consultable sur le site FFLSAS |
Le 1er juillet, un drame similaire va se dérouler au village de
Kergoët, près de Langoëlan, où le fermier Joseph Le Padellec héberge une
vingtaine de FFI qui sont encerclés par des soldats allemands et géorgiens. L’épouse
de Padellec va néanmoins réussir à s’échapper et prévenir des FFI cantonnés au
village du Cosquer, en Ploërdut, qui accourent sur les lieux. Parmi ceux-ci, se
trouve le sergent parachutiste
Fernand Bonis, chargé de leur
instruction. Une compagnie FTP de
Désiré Le Trohère, Alexandre, se joint en renfort. Touché lors du combat,
Bonis est capturé. Avant de partir, les Allemands incendient la ferme à
l’intérieur de laquelle on retrouvera les corps calcinés des patriotes Le
Gouar, Le Padellec, Pimpec et celui du parachutiste Bonis, qui n’était que
blessé. C’est le 20e SAS tué depuis le 6 juin. A la suite de cette
attaque, les patriotes soupçonnent la famille Baucher, du village Petit-Rose en
Silfiac, d’avoir dénoncé le maquis. Le 13 juillet, le capitaine Alexandre fait arrêter le mari et la
femme puis, après les avoir interrogés très longuement, les remet en liberté,
convaincu de leur innocence. Deux jours plus tard, trois hommes du 5e
FFI décident de les exécuter, ainsi que leurs deux fils. La suite est
dramatique. Un des fils, Laurent, âgé de quinze ans, qui a reçu une balle dans
la nuque et dans la main, réussit malgré tout à s’enfuir car le revolver qui
devait lui donner le coup de grâce s’est enrayé et la lumière s’est éteinte.
Les trois FFI tuent ses parents et son frère Amédée, dont ils violent la
fiancée. A la Libération, lors de l’enquête effectuée sur cette affaire, le
prisonnier de guerre allemand Werner Pein, 37 ans, est interrogé à la Maison
d’arrêt de Rennes : « Je ne me
souviens pas qu’une femme de la région de Silfiac serait venue dénoncer un
maquis dans la région de Langoëlan. C’est la première fois que j’entends parler
de cette affaire. Je puis d’ailleurs affirmer qu’aucune dénonciation ne m’a été
faite sur le maquis de Kergoët car à chaque fois qu’une dénonciation m’était
rapportée je transmettais un rapport, les renseignements au bureau du Corps
d’armée. Or, dans cette affaire, je puis affirmer que je n’ai pas fait de
rapport à mes chefs. Je précise que le 1er juillet 1944, la
Feldgendarmerie de Pontivy n’a pas participé à une opération dans la région de
Langoëlan. »
Le 19 juillet, des
gendarmes du Vieux-Bourg se présentent au maquis de Coat-Mallouen pour demander
qu’une patrouille fasse des recherches car deux « espions » ont été
repérés dans le secteur. Les maquisards ne trouvent pas les deux espions en
question mais reviennent au camp avec trois autres personnes : un homme et
deux femmes, des nomades porteurs d’une grosse somme d’argent et soupçonnés de
renseigner les Allemands. Condamnés à mort par le chef des FFI, un officier SAS
et le chef de l’équipe Jedburgh Frederick,
le major Wise, ils sont exécutés en même temps qu’un milicien de Guingamp,
surnommé « Petit-Gris ». On retrouve cette affaire dans un témoignage
très intéressant, rédigé après-guerre par le jeune radio américain Robert Kehoe, de l’équipe Jedburgh Frederick, sur sa
participation aux combats de Duault puis de Coat-Mallouen : « Le maquis et les
SAS ont emprisonné trois personnes qu'ils accusaient d'avoir informé les
Allemands de notre situation. La punition était rapide et sévère. L'un des
trois a été exposé au public et battu avant d'être abattu. Je ne pouvais pas
juger les accusations, mais je regrettais de ne pas avoir protesté contre le
traitement abusif. Nous avons cependant été submergés par l’immédiateté du
danger et la nécessité de notre propre action. Je soupçonne que nous ne
voulions pas paraître "doux" envers ceux qui sont accusés de crimes
aussi graves. Le major Wise a déclaré par la suite qu'il existait des rumeurs
selon lesquelles le traitement sévère infligé à des hommes des forces spéciales
capturées par la suite par l'ennemi aurait été lié à cet incident. »
Ce qui semble surtout choquer le major britannique Adrian Wise, c’est le fait que
ces exécutions furent effectuées à la vue de tous. Quelques jours plus tard, le
21 juillet c’est au tour de quatre pilleurs de ferme, d’être fusillé par des
SAS à Bréhan-Loudéac.
Ces
exécutions sommaires sans jugement préalable ne se limitent pas aux seuls traîtres
ou « collabos ». Elles peuvent aussi se produire au sein même du bataillon SAS. Ainsi, le 5 août 1944, à Josselin, le sergent SAS Jacques Détroy, 20 ans, est :
« tué au cours d’un engagement avec
l’ennemi », selon la version officielle. Les circonstances exactes de
sa mort n’ont jamais été réellement élucidées. Selon Fanny Pascual, qui a fait une intéressante communication sur ce thème des « dérapages » : « Plusieurs versions s'affrontent dans le cercle des SAS, dont les témoins ont demandé l'anonymat ». D’après le témoignage d’un
vétéran du SAS, recueilli après-guerre, le sergent Détroy, qui contestait les
ordres de son supérieur hiérarchique, le sous-lieutenant Taylor, aurait été
exécuté par celui-ci pour refus d’obéissance. A cela s'ajoute, selon d’autres témoins, une
querelle sentimentale, dont l’origine remonte à Londres, qui aurait attisé la
jalousie entre les deux hommes. Quoi qu’il en soit, le sous-lieutenant Taylor ayant
été tué le 8 avril 1945 au cours de l’opération Amherst, sans avoir rédigé de
rapport sur cet acte supposé de mutinerie, mais on sait que les groupes de parachutistes
agissaient en toute autonomie, cette exécution reste encore inexpliquée. Signe du malaise au sein des associations d'anciens parachutistes et de la chape de plomb qui entoure cette affaire, David Portier, dans son ouvrage de référence Les parachutistes SAS de la France libre, p. 398, élude soigneusement les raisons de la mort de Détroy « à son retour, Jacques Quillet apprend la mort du Sgt Détroit qui a été tué le 5 août », alors que des années auparavant, dans son ouvrage Le Morbihan en guerre, p 557, Roger Leroux évoquait cette affaire « Le 5 à Josselin, un sous-lieutenant parachutiste ordonne qu'on abatte immédiatement un de ses hommes qui l'a menacé de son revolver. Sans que l'intéressé soit traduit devant un conseil de guerre, un de ses camarades est contraint d'exécuter un ordre aussi contestable. »
Le commandant Bourgoin et le capitaine Deplante |
Ce
même jour, le 5 août 1944, le capitaine Deplante, qui était entré la veille au
soir dans la ville, désertée par les Allemands et occupée par la Résistance et
les Américains, prend le commandement de la place de Pontivy afin de maintenir
l’ordre « en raison du trop grand
nombre de patriotes armés tirant dans les rues ». Deplante met en
place une « police militaire »
d’une quarantaine d’hommes chargés « d’arrêter tout
patriote armé trouvé dans les rues après le 6 août midi » et ordonne aux unités FFI et
FTP de quitter la ville pour rejoindre leurs zones de combats. Deplante raconte
comment, lors de son entrée en ville : « Une compagnie FTP avait aussitôt arrêté cinq hommes, un Pontivyen et
quatre Algériens, marchands forains qui circulaient dans le département et
qui étaient connus des organisations patriotiques, pour entretenir des
intelligences avec les Allemands. Des renseignements fournis par eux aux
troupes occupantes avaient amené l’arrestation de nombreux patriotes, dont
plusieurs avaient été passés par les armes. Conduits à la prison de la rue
Friedland, ces cinq traîtres ont été exécutés, sans jugement préalable
semble-t-il. »
Léon Schermesser, photo consultable sur le site FFLSAS |
Si,
pour des raisons de sécurité du maquis, certaines exécutions peuvent se comprendre, on peut se demander ce qui justifie l'exécution de ces quatre civils désarmés et fusillés sans autre forme de procès, par un sous-officier français, le 6 août
1944 à quelques kilomètres de Pontivy, où Deplante a rétabli l'ordre. En effet, vers 20 h, ce jour-là, sur le champ de foire
de Baud : « Eut lieu
l’exécution publique de quatre individus, les sieurs (il n'est pas nécessaire de citer leurs noms), à qui étaient imputés des vols qualifiés et des
viols. Cette exécution fut opérée à l’aide d’un fusil mitrailleur par le
parachutiste Schermesser Léon, et sur ordre donné par le sergent parachutiste
Payen Michel, lequel commandait une section de parachutistes détachés auprès du
5e Bataillon FTP, le Bataillon Jacques. » Les gendarmes de
la brigade de Baud, à qui ces suspects auraient dû être remis, puisque les
Allemands avaient quitté la ville, étaient-ils au courant ? Ont-ils
assisté à la scène ? Selon le rapport de police : « Il ressort de l’analyse des faits que le
sergent parachutiste qui ordonné l’ordre de mise à mort et le parachutiste qui
l’a exécuté ont agi dans le service, d’autant qu’à la date du 6 août 1944, qui
coïncide avec celle de la retraite des troupes allemandes sur Lorient, la
liaison n’était plus assurée entre le groupe des parachutistes de Baud et leur
chef direct, le lieutenant Deplante, et il était du plus grand intérêt, Baud se
trouvant alors en pleine zone d’opérations militaires, d’assurer la sécurité
des FFI en mettant les suspects dans l’impossibilité de nuire. » Les
faits qui ont motivé l’ouverture d’une information ayant été commis « dans le service », les enquêteurs concluront qu’en conséquence : « l’autorité judiciaire militaire est seule compétente pour les examiner. » Sur la citation militaire de Schermesser, il est noté : « A participé brillamment au nettoyage du Morbihan. » Roger Leroux cite d'autres cas similaires , ainsi cet Allemand venu se rendre à un paysan, près de Questembert : « des parachutistes l'abattent après lui avoir fait creuser sa tombe. » Il aurait sans doute été préférable qu'il se rende aux Américains. A Baden : « un collaborateur avéré, probablement à l'origine de l'arrestation du commandant Manceau, est tué au couteau par un parachutiste. » Le 7 août, à Inzinzac : « un parachutiste abat un trafiquant qui s'est livré au marché noir pour le comte des Allemands. » Le 12, à Hennebont : « l'ancien interprète des Allemands est abattu par un parachutiste, tandis qu'à Lochrist l'ancien recruteur local de la LVF connaît le même sort. »
Au regard des exécutions sommaires commises par la Résistance lors de l’épuration, qui oscillent entre 200 pour les Côtes-du-Nord et 250 pour le Morbihan, départements où la Résistance fut la plus active, celles effectuées par des parachutistes restent assez rares. Dans ce contexte de soif de vengeance, il faut rappeler que sur les 77 parachutistes du 4e bataillon SAS qui ont perdu la vie en Bretagne, à peine la moitié ont été tué au combat les armes à la main ; les autres ont été capturés sans avoir tiré un seul coup de feu, alors qu'ils étaient blessés ou désarmés (Marienne à Kerihuel), le plus souvent torturés puis ensuite exécutés.
Au regard des exécutions sommaires commises par la Résistance lors de l’épuration, qui oscillent entre 200 pour les Côtes-du-Nord et 250 pour le Morbihan, départements où la Résistance fut la plus active, celles effectuées par des parachutistes restent assez rares. Dans ce contexte de soif de vengeance, il faut rappeler que sur les 77 parachutistes du 4e bataillon SAS qui ont perdu la vie en Bretagne, à peine la moitié ont été tué au combat les armes à la main ; les autres ont été capturés sans avoir tiré un seul coup de feu, alors qu'ils étaient blessés ou désarmés (Marienne à Kerihuel), le plus souvent torturés puis ensuite exécutés.
(1) Parachutistes contre parachutistes.
Dépendant lui aussi du II. Fallschirmjäger-Korps, le Fallschirmjäger-Ersatz-und Ausbildungs-Regiment 2, est un régiment de formation et d’entraînement de parachutistes allemands (qui n'ont de parachutiste que le nom, la plupart n'ayant jamais effectué de saut). Stationné dans le Morbihan durant le mois de juin 1944, il est sous les ordres du colonel Deffner, dont le QG est installé à Josselin. Ce régiment ne comporte que trois bataillons, dont les PC sont respectivement situés au sud de Josselin (commandant Hellmünd), à Ploërmel (colonel Bertels) et, pendant quatre jours, à Augan, commune située entre Ploërmel et Coëtquidan, puis à Saint-Nazaire (commandant Scherwitz). On dénombre quatre compagnies par bataillon, dont deux : les 7e et 8e, vont être engagées le 18 juin contre le camp de Saint-Marcel. Au sujet de ce régiment, plusieurs ouvrages évoquent : « des parachutistes de la division Kreta », oubliant que cette 7e division d’élite du général Student, décimée au mois de mai 1941 en Crête, n’existe plus. Cette confusion vient du fait que plusieurs vétérans de cette division, incorporés dans les unités du II. Fallschirmjäger-Korps, portaient une bande de bras avec l’inscription « Kreta ».
D'après le docteur Devau, Jours d'épreuve dans le Morbihan, 1944, p. 11 : « Le colonel allemand Deffner qui commandait la place allemande de Josselin était un homme sensible et clément. A plusieurs reprises il a libéré des prisonniers et s'est montré humain vis-à-vis de la population ».
(2) Il sera innocenté et réhabilité à la Libération.
(3) "L'occupant aurait perdu 45 hommes", Christian Bougeard, Histoire de la résistance en Bretagne, p. 99.
Ajouté le 25 octobre 2019
Dépendant lui aussi du II. Fallschirmjäger-Korps, le Fallschirmjäger-Ersatz-und Ausbildungs-Regiment 2, est un régiment de formation et d’entraînement de parachutistes allemands (qui n'ont de parachutiste que le nom, la plupart n'ayant jamais effectué de saut). Stationné dans le Morbihan durant le mois de juin 1944, il est sous les ordres du colonel Deffner, dont le QG est installé à Josselin. Ce régiment ne comporte que trois bataillons, dont les PC sont respectivement situés au sud de Josselin (commandant Hellmünd), à Ploërmel (colonel Bertels) et, pendant quatre jours, à Augan, commune située entre Ploërmel et Coëtquidan, puis à Saint-Nazaire (commandant Scherwitz). On dénombre quatre compagnies par bataillon, dont deux : les 7e et 8e, vont être engagées le 18 juin contre le camp de Saint-Marcel. Au sujet de ce régiment, plusieurs ouvrages évoquent : « des parachutistes de la division Kreta », oubliant que cette 7e division d’élite du général Student, décimée au mois de mai 1941 en Crête, n’existe plus. Cette confusion vient du fait que plusieurs vétérans de cette division, incorporés dans les unités du II. Fallschirmjäger-Korps, portaient une bande de bras avec l’inscription « Kreta ».
D'après le docteur Devau, Jours d'épreuve dans le Morbihan, 1944, p. 11 : « Le colonel allemand Deffner qui commandait la place allemande de Josselin était un homme sensible et clément. A plusieurs reprises il a libéré des prisonniers et s'est montré humain vis-à-vis de la population ».
(2) Il sera innocenté et réhabilité à la Libération.
(3) "L'occupant aurait perdu 45 hommes", Christian Bougeard, Histoire de la résistance en Bretagne, p. 99.
Ajouté le 25 octobre 2019
A
propos de cette affaire de Baud, il me revient en mémoire un ouvrage du colonel
de Branges de Civria, paru en 1946 : La
Libération dans le Morbihan. Ayant quitté Paris au début du mois de juillet
1944 pour rejoindre Sarzeau, cet a pris le commandement de toutes les unités
stationnée dans le Morbihan à compter du 7 août 1944, deux jours après la
libération de Vannes, avec pour mission de rétablir l’ordre dans le
département. Le 10 août, il se rend à Baud. On peut constater que son récit ne
correspond pas exactement au rapport d’enquête du Parquet du Procureur de la
République de Pontivy du 26 mars 1948 relatif aux quatre exécutions du 6 août :
« Mercredi
9 août : A 20 heures je suis de nouveau à la préfecture où je dois dîner
avec le lieutenant-colonel commandant les parachutistes et un speaker de la
radio française de Londres. Le premier est un peu en arrière de la main au
début parce qu’on lui avait promis le commandement militaire du Morbihan et qu’il
s’en voit frustré. C’est un magnifique soldat qui a perdu un bras à la guerre. Dans
le Morbihan, ces dernières (unités FFI et
FTP) ont été puissamment aidées par les parachutistes qui dans les combats
livrés à l’ennemi avant la Libération ont perdu la moitié de leur effectif. Comme
je demandais à leur chef quelle était la proportion des tués et des blessés, il
me répondit : « Chez nous il n’y a que des morts. » Au mépris
des lois de la guerre, la Wehrmacht refusait la qualité de combattants aux
parachutistes comme aux FFI et aux FTP et fusillait tous ceux qui tombaient
entre ses mains. Que les représailles aient été si rares, il y a lieu de s’en
étonner et les Américains qui s’indignaient des deux seuls cas où dans le
Morbihan des prisonniers allemands aient été exécutés finirent par approuver ce
qui avait été fait quand ils connurent les forfaits dont s’étaient rendus
coupables ceux qui furent abattus.
Jeudi
10 août : De retour à mon PC, je suis avisé que de graves désordres se
sont produits dans le gros bourg de Baud. Le drapeau tricolore a été amené et
remplacé par le drapeau rouge, une vingtaine d’Allemands et six Français y ont
été fusillés sans jugement, le curé et son vicaire menacés de mort ont dû
prendre la fuite, la population s’enferme chez elle et n’ose plus sortir dans
la rue. Je décide de commencer par là mes tournées dans le Morbihan et de m’y
rendre le jour même. A 14 heures, je pars en automobile avec le colonel des FFI
et le chef des FTP. En arrivant, je constate que les trois couleurs flottent
toujours au clocher de l’église encadré par le drapeau de nos trois alliés.
Beaucoup d’habitants sont dehors. Je leur demande de faire cercle autour de moi
et je prononce les paroles suivantes : « Je vois avec plaisir que
tout ce que l’on m’avait dit sur vous est faux : la terreur ne règne pas à
Baud et le drapeau tricolore est toujours vote drapeau. Ne l’abandonnez jamais
(…) Nous nous rendons ensuite à la mairie pour procéder à une enquête sur les
faits qui nous ont été signalés. L’adjoint affirme que l’ordre n’a jamais été
troublé, que chacun vaque à ses occupations sans être inquiété. Si le curé et
son vicaire ont dû se cacher, c’est parce qu’ils appartiennent au parti
autonomiste breton. Aucun Français n’a été fusillé, le seul qui ait été tué
était un dénonciateur patenté de la Gestapo. Lorsqu’on voulut l’arrêter, il se
défendit à coups de grenades et il périt au cours de l’échauffourée qui suivit.
L’exécution d’une vingtaine d’Allemands se réduit à la mort de cinq d’entre eux
qui n’étaient pas des soldats pris en combattant mais les tortionnaires de la
prison de Locminé fusillés par leurs victimes (…) Je dus convenir que la
fusillade avait été une mort bien douce pour de pareils misérables qui auraient
mérité d’être torturés à leur tour auparavant. »
Vendredi
11 août : Je vais voir le préfet au cours de la matinée. Il se plaint de
l’indiscipline des parachutistes qui font scandale ; ils réquisitionnent
des voitures pour leur usage personnel et les utilisent pour promener des
femmes de mauvaise vie alors que l’on manque d’essence pour les battages. Ils
chantent à tue-tête et font du bruit jusqu’à une heure avancée de la nuit. Je
sais d’ailleurs à quoi m’en tenir car j’ai trouvé sur mon bureau le compte
rendu d’un chef de patrouille FFI qui ayant voulu arrêter deux d’entre eux à
une heure du matin a dû y renoncer parce qu’ils le menaçaient de leur pistolet.
Dans l’état d’ébriété où ils se trouvaient ils n’auraient pas hésité à tirer.
Un de mes officiers m’a aussi rapporté qu’il est intervenu auprès de trois
parachutistes qui, avachis contre un mur, se chamaillaient et braillaient. Il
s’est entendu répondre : « Ben quoi, on ne peut plus s’amuser
maintenant. » Comme il leur disait que si leur colonel le savait il ne
serait pas fier d’eux, ils répliquèrent : « Notre colonel on s’en
fout et on l’emm… quiquine. » Certains d’entre eux se répandent en propos
désobligeants sur les Américains dans les cafés, déclarant à haute voix :
« On a flanqué les Boches dehors, qu’est-ce qu’on attend pour en faire
autant de ceux-là. » Ce sont des braves à tout crins qui ont payé de leurs
personnes plus que quiconque, pour cette raison on peut leur passer bien des
choses mais, véritablement, ils exagèrent. Je convoque leur chef à mon bureau
et je le mets au courant de ces divers incidents. Il se contente de hausser les
épaules et de déclarer : « Ils seront tous tués un jour ou l’autre,
alors on peut bien leur pardonner quelques incartades. »
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
RépondreSupprimer