Moins
célèbre que son jeune frère Jacques-Yves Cousteau – le commandant au bonnet
rouge – Pierre-Antoine Cousteau (1906-1958) fut un collaborationniste résolument
engagé, notamment au journal Je suis
partout, avec Lucien Rebatet ou bien encore Robert Brasillach. Les deux
articles qui suivent ont été publiés au tout début du mois de juillet 1944. Il
s’agit d’un « reportage » de Cousteau « venu rejoindre en Bretagne mes camarades les francs-gardes bénévoles de
la région parisienne partis comme volontaires ». La « Deuxième
unité de marche » de la Milice française arrive en effet le 8 juin 1944 à
Rennes, en provenance de Poitiers. Ces francs-gardes sont cantonnés dans un
premier temps rue de Griffon, avant de prendre leurs quartiers à l’Asile
Saint-Méen et au château d’Apigné.
Bâtiment où séjourna la Milice au 5, rue du Griffon |
Comme l’écrit Cousteau, c’est la déception
« Les francs-gardes de Paris étaient
partis pour se battre. Ils étaient pressés de décerveler des terroristes, de
venger sur les salopards de la résistance juive tous nos camarades assassinés.
Mais au lieu d’embuscades meurtrières et romantiques (…) Il a fallu déblayer
les décombres de Rennes et de Fougères. » La ville de Fougères a été
durement touchée par deux vagues de bombardement les 6 et 8 juin 1944, faisant
plus de 200 victimes. Á peine arrivé à Rennes, un groupe de miliciens, parmi
lesquels le jeune « Fernand », dont on lira la lettre plus bas, est
envoyé là-bas pour déblayer. Le reste de la troupe prêtera main forte aux
secouristes lors des bombardements des 9 et 12 juin 1944 à Rennes. Ces corvées
de déblaiement n’empêchent pas les miliciens, sous les ordres du sinistre De
Constanzo, dont Cousteau nous dresse un véritable panégyrique, de procéder aux
arrestations de « terroristes » qui sont ensuite emprisonnés à
l’asile Saint-Méen. « Allons au
« trou » jeter un coup d’œil sur les captifs. Ils sont une
cinquantaine, dont une demi-douzaine de femmes » écrit Cousteau.
Durant
tout le mois de juillet et jusqu’à l’arrivée des Américains, ce ne seront que
rafles, arrestations, tortures et exécutions sommaires. Cousteau est déçu. Ses
camarades lui proposent bien une expédition le jour même de son arrivée « Oh ! une toute petite expédition »,
mais il aurait préféré « l’assaut d’un
bourg FTP ». Notre reporter devra donc se contenter d’une « capture sans histoire » de ses deux
premiers « clients », puis
d’un troisième « cueilli »
sans difficulté. Ils seront d’ailleurs relâchés plus tard ! Quoi qu’il en
soit « c’est toujours excitant de
jouer au gendarme et au voleur en pleine nuit avec de vraies armes… » Comble
d’ironie, le jour-même ou parait l’article de Cousteau dans Je suis partout, daté du 7 juillet 1944,
les francs-gardes sont engagés dans une opération contre le maquis du bois de
Buzot à Broualan. Le reporter eut alors pu voir ses « camarades » à l’œuvre,
notamment Constanzo, qui va se défouler à coups de ceinturon sur l’adjudant
Imbert, obligé de se déshabiller. Un autre résistant, René Capitan, nu lui aussi, sera frappé à coups de nerf
de bœuf, avant d’être abattu d’une balle dans la tête. Son corps sera laissé sur place. Après avoir fait trois
autres victimes dans le bourg de Broualan, les miliciens rentrent sur Rennes en
effectuant plusieurs arrestations.
Sur le chemin du retour, ils font halte à
Saint-Rémy-du-Plain, où huit résistants sont abattus dans une carrière. Les patriotes
restants sont ensuite amenés à l’asile Saint-Méen où s’effectue un premier tri
avant les tortures au château d’Apigné.
Patriotes encadrés par la Milice à l'asile Saint-Méen |
Je suis partout (ADIV) |
Retranscription (avec les fautes) de
la lettre en date du 19 juin 1944, adressée à son chef par le jeune milicien Fernand :
Chef,
Deux mots pour vous donner de mes nouvelles qui ne sont pas trop mauvaise
et j’espère que vous c’est de même ainsi que celle des copains.
Notre départ de Paris a été un peut mouvementé, arrivé à Falguère station,
alerte, arrêt des trains, je dessent et à la surface bombardement en règle,
tire de DCA. J’ai vue pour mon compte descendre 7 saloparts. Arrivé à Auteuil
le car était partit depuis ¼ d’heure, aucun officier pour me renseigner, le
matin j’ai rencontré à la gare un chef de dizaine qui a téléphoner rue Drouot
et ces le chef de la Rivière qui a répondu. Le train était à un km de la gare
mais qu’il fallais rejoindre Drouaot qu’il y aurais une voiture pour
ravitailler les copains, pour finir nous avons retrouver les copains à Auteuil,
nous avons pas retrouver les camarades dans le train pour les ravitailler. Nous
avons eut des camions pour aller d’Auteuil à Austerlitz car l’autre gare était
foutue.
Dans le train petit accident, nous avons croisé un train du génis Français
avec sur les portes des croix de Lorraine, sur les interpellations de nous
autres, ils ont montré le point lever. Nous avon été trouvé notre chef de
convois, il nous a répondu qu’il nous interdisais formellement toute
manifestation, qu’elle plaisir que l’on aurai eut de les descendres. Nous
sommes a 10 heures du matin nous avons roulé jusqu’à 1 heure. Arret d’une heure
sur la voie ensuite nous sommes repartit, arrivé à Poitier à 9 heures du soir,
le matin lever à 7 heures, petit déjeuner à 8 heures. Ensuite distribution des
effets, j’ai été désigné pour essayer les complets, chaussures etc. ensuite
distribution d’arme par les chefs de dizaine. J’ai récolté un fusil américain,
je fais remarquer que les armes ont été distribuées par camaraderie ainsi que
la désignation des chefs de dizaine et de main, pour les corvés de casernement
ca na pas manqué, enfin nous avont avec 5 jours sans aucun maniement d’arme,
une chose bien maleureuse c’est que nous avons beaucoup de jeune qui n’ont pas
été militaires. Resu l’ordre de prendre juste le néssaissaire de linge de
corps, le matin lever à 2 heures, départ à 3 heures nous arrivons à la gare pas
de train tout les employés partit, nous avons réquisisionner des cars et des
voitures particulières qui nous ont emmener à Rennes. De Rennes nous avons
rester 2 jours dans les cars a coucher ensuite départ pour Fougère arrivé dans
les environs nous avons assisté au bombardements de cette ville qui n’était pas
objectif militaire, le lendemain après-midi noud avons pus rentré en ville rien
que des ruine avec des bombes a retardements enfin comme les anglais revenais
nuit et jours nous avons été forcé de couché dans les cars hor de la ville.
Depuis quelques jours nous avons réquisissionner un pensionnat de jeunes
filles tenu par des sœurs nous avons un lit de pensionnaire de jeune fille des
photo de piété, mais toutes les nuits c’est un bombardement formidable, des
bombes a retardements qui éclate, quelle musique !
Notre travail consiste a faire la police à descendre les pillards à
déterrer les cadavres à dégager les ensevelis vivants, en un mots a faire un
travail pour lequelle l’ont n’est pas venu, depuis le matin 6 heures1/2
jusqu’au soir 11heures on ne fait qu’a être en service, jamai un jours de
liberté, tenu comme au bataillon de discipline, tout les camarades en ont mare
car l’ont nous prend pour des imbéciles, nous n’avons pas encore eut l’occasion
de faire un combat, notre moral est a bout. Quand a mois il n’en manque de peu
que je prenne la déssision de retourner a Melun et si l’ont ne veut pas me
laisser partir en prenant une voiture, car jamais ici ont ne prendra part au
combat.
Je suis venu comme volontaire pour me batre et non comme planqué pour mener
une vie de caserne, j’ai un grand regret d’avoir accepté cette campagne.
J’aurai mieux fait de partir dans la Waffen SS que de venir à la milice pour
éplucher les patates, corvé de tinette, fossoyeur en un mots faire l’imbécile.
Je ne conseillerais jamais a personne de partir de cette manière.
Chef ne voyant plus rien à vous dire pour l’instant je termine en vous
serrant une cordiale poignée de mains et vous donnant le salut milicien.
Signé : Fernand
PS : Je mescuse au-près des copains de n’avoir pas écris mais
réellements cela m’est impossible pour l’instant, à tous une fraternelle
accolade.
Je suis partout du 7 juillet 1944 (ADIV) |